Abdelaziz Abbassi
Dans un atelier à son domicile à Marrakech, Abdelaziz Abbassi trouve plus de temps aujourd’hui pour se consacrer à la peinture, depuis son départ à la retraite il y a tout juste deux ans. Cet exercice quasiment quotidien représente une continuité de ses longues années en tant qu'enseignant dans différentes écoles publiques.
Son parcours s’est ainsi dessiné au fil des années, bien qu’il n’ait pas été destiné au dessin de manière classique. Abdelaziz Abbassi conserve bien les souvenirs de ses débuts en autodidacte. «Le véritable déclic, c'était lorsque mon frère m’a donné un prix qu’il avait eu à l’école : une rame de papiers, un coffret de peinture et des pinceaux.»
Au collège, il s’en est servi pour reproduire des paysages, de la nature morte. «J’avais toujours la passion de prendre le temps de faire les choses, de me concentrer avec des dessins pour les fignoler et d’avoir toute la patience de m’appliquer à les perfectionner», se souvient-il.
Le dessin entre passion et outil pédagogique
Dans le dessin, l’instituteur trouve en effet une passion d’enfant, mais aussi un véritable outil pédagogique qu’il a intégré au processus d’apprentissage auprès de ses élèves, dès la fin des années 1970. «Dessiner m’a permis de créer beaucoup d’interaction en classe et a permis aux élèves d’apprendre tout en s’amusant et en s’épanouissant», décrit-il.
Cinq ans plus tard, Abdelaziz Abbassi est revenu à la formation, pour devenir professeur de dessin et d’arts plastiques au collège. Il se rappelle de l’artiste peintre Moulay Ismaïl Bourqiba, connu à Beni Mellal, qui lui aura été «d’un grand soutien dans [sa] préparation au concours d’accès». «Nous étions seulement trois à être retenus dans cette filière, en dehors de ceux qui ont déjà été formés à l’Ecole des Beaux-Arts», se souvient-il en rendant hommage à son mentor.
Une visibilité de l’autre côté de la Méditerranée
Affecté cette fois-ci à Fqih Bensalah, Abdelaziz Abbassi a continué à développer ses techniques de dessin, parallèlement aux cours qu’il a donnés à ses collégiens. Travaillant jusque-là sur le pointillage du noir et blanc, il a enfin pu organiser ses premières expositions, à l’initiative d’associations culturelles locales.
«J’ai commencé à intégrer le monochrome en utilisant des couleurs naturelles, notamment le brou de noix, qui donne des nuances chaudes de marron intéressantes, rappelant les couleurs de la terre, des sols, des ksour des kasbahs marocaines», nous explique-il. Peu à peu, les autres couleurs s’y sont jointes, à travers l’aquarelle mais aussi le tressage, le collage et des techniques mixtes.
En pleine évolution de ses dessins, Abdelaziz Abbassi fait une rencontre, qui permettra à ses travaux de sortir de sa région natale. «Connus à Fqih Bensalah, les propriétaires du Café Tafilalet destinaient leur espace aux expositions également. Salma Garaudy, qui s’était juste arrêtée à la station d’essence proche pour faire un plein, a ainsi découvert mes travaux et a acheté plusieurs toiles», se souvient le peintre.
Veuve du philosophe et ex-cadre du Parti communiste français (PCF) Roger Garaudy, elle est agréablement surprise de voir cette dynamique dans une région à l'époque marginalisée. «A chaque déplacement, elle achetait encore des tableaux pour les exposer à Cordoue, en Espagne», se souvient le peintre avec nostalgie.
Après son affectation cette fois-ci à Marrakech, au début des années 2000, Abdelaziz Abbassi expose ses travaux de plus en plus régulièrement, dans la salle de Bab Doukkala, ainsi que d'autres lieux d'exposition privés ou institutionnels, mais aussi à Essaouira, dans des galeries rattachées aux maisons d’hôtes, ou encore à Rabat.
Bab Fteuh, dans la série des portes de Marrakech. Encres sur papier - 2020 / Crédit : Abdelaziz Abbassi
Marrakech, le fief d’une continuité dans la peinture
Malgré sa retraite de l’enseignement public en 2018, Abdelaziz Abbassi n'a pas l’impression d’avoir mis fin à son activité. Il a continué à donner des cours, cette fois-ci dans des écoles de design et d’infographie, notamment au Collège LaSalle de Marrakech.
Durant la période de confinement sanitaire lié à la pandémie du nouveau coronavirus, il en a profité pour se consacrer plus longtemps à la peinture. Mais jusque-là, ces travaux sont restés confidentiels, surtout connus par des professionnels d’arts plastiques.
«Au détour d’un échange avec Gabriel Martel, qui est un ami et rédacteur en chef d’ID Prestige, celui-ci m’a conseillé de promouvoir mes travaux plus largement et de communiquer dessus à travers les réseaux sociaux», souligne Abdelaziz Abbassi, dont la page est notamment suivie par de jeunes internautes.
Bab Kchich - aquarelle sur canson, 2020 / Crédit : Abdelaziz Abbassi
«Gabriel Martel s’en est chargé gracieusement et cela m’a permis de créer beaucoup d’interactions avec les utilisateurs, amateurs, passionnés et professionnels de dessin», déclare celui qui estime «important d’avoir un écho extérieur sur ses propres travaux pour continuer à s’améliorer et à apprendre, quel que soit l’âge et l’expérience».
A l’instar de sa carrière d’enseignant, sa page revêt un aspect ludique et éducatif. «On dessine pour soi lorsqu’on choisit des thématique qui nous tiennent à cœur, mais on dessine aussi pour échanger avec les gens qui font la société à laquelle nous appartenons», explique-t-il.
Abdelaziz Abbassi a développé des techniques proches du dessin expressif, souvent utilisé pour accompagner du texte ou de la poésie. Grâce à cela, il contribue aux carnets de voyage «Vivre à Essaouira» et «Vivre à Marrakech». Son ambition désormais est de trouver un éditeur pour regrouper son propre carnet de voyage, qui compilera des croquis aquarellés, inspirés notamment de ses virées en ville ou dans les montagnes de l’Atlas.
Source: Yabiladi
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