Aziz Sahaba
Le peintre puise dans la richesse des techniques, des matières et des couleurs. Il utilise ainsi le papier, le carton, les coupures de journaux…le tout collé et traité au pastel. Son travail est «une superposition de surfaces. L'espace du travail est animé par un ensemble de plans: des graphismes, de la couleur ou encore des corps et des visages. Rien ne disparaît chez Abdelaziz Sahaba, mais tout se transforme», commente l'historien de l'art Moulim Laroussi.
La diversité des éléments, associée à la légèreté de la couleur crée dans l'œuvre de Sahaba une dynamique vibrante particulière. Les nuances claires et les ondulations du corps de l'homme interpellent dès le premier abord. C'est une couleur meurtrie, blessée, qui laisse jaillir une émotion indéfinie ou plutôt qui se définit par le malaise qu'elle génère chez nous ; qui assistons attendris à ce débattement désespéré. Les mots «gribouillés» sur le fond, quant à eux, rappellent des lettres anonymes envoyées à celui qui contemple la scène.
Les personnages de Sahaba essayent de dire des choses, d'exprimer leur mal-être et d'avouer leur impuissance devant un destin sans complaisance. «En les regardant de près, on sent monter comme une lamentation profonde, lamentation de ceux qui furent abandonnés par la providence», décrit Moulim Laroussi. Le pinceau de Aziz Sahaba dessine la tragédie. Malheur et détresse sont les deux sentiments qui se dégagent des visages et des corps. Abandonnés à leur sort sur des espaces déprimés et désolés, ils sont la proie d'une mélancolie et d'une angoisse terrible et indicible.
Livrés à eux-mêmes, les corps de Sahaba sont sans identité sexuelle. Ces corps, ni hommes ni femmes, sont absolus et ouverts à toutes les possibilités et à toutes les interprétations. Sans appartenance sexuelle, ces corps vous laissent le libre choix de leur donner un sexe ainsi qu'une vie. Aziz Sahaba travaille exclusivement sur le corps, dans sa nudité aussi bien physique que psychologique. Son pinceau véhicule une expression forte avec un langage poétique.
Né en 1965, ce jeune artiste était déjà interpellé par le graphisme et la forme dès son jeune âge. Diplômé de l'École des Beaux-Arts de Tétouan en 1990, il se consacre entièrement à sa carrière artistique à partir de la deuxième moitié des années quatre vingt dix. Il commence tout d'abord en rejoignant le fameux collectif d'artistes casablancais "La Source du Lion", avec lequel il exposera en 1995 dans plusieurs instituts français. Sa peinture se fait remarquer, quatre ans plus tard, lors de la cinquième Biennale de la jeune peinture marocaine organisée par la Fondation Wafabank.
Depuis, sa carrière tarde à démarrer. Ce n'est qu'avec l'exposition «Absolutment Artiste» qu'il réussit à présenter sa première exposition individuelle à Tanger et vendre ses premières œuvres. Depuis, rien n'arrête la créativité de ce féru de peinture.
Source: Le Matin
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